SOMMAIRE:
LES RAPPORTS
DES ARABES ET
DE L'AXE . AVANT
ET PENDANT LA GUERRE
Irak.
La révolte d'Irak.
L'Egypte et la guerre.
Syrie-Liban.
Hadj Amin al Husseini et les émigrés.
"Aux Arabes de Palestine et aux Musulmans du monde entier,
y compris ceux des Etats-Unis, de s'insurger contre les Alliés,
de rejoindre la 5e Colonne, de commettre des actes de sabotage et de tuer
les Juifs. "
ORGANISATION DES
Légions MUSULMANES.
APRES LA GUERRE ON A Ménage
LES ARABES
APPEL AUX ARABES
D'Amérique
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LES RAPPORTS
DES ARABES ET
DE L'AXE . AVANT
ET FENDANT LA GUERRE
Les faits rapportés dans ces pages ne sont pas
des révélations. Nul ne peut en contester l'authenticité.
Et pourtant, il existe aujourd'hui une tendance à les ignorer, comme
n'ayant plus de valeur politique. Cette tendance est regrettable, parce
que les. données que nous présentons ici conduisent à
des conclusions encore valables et toujours en action dans la politique
des peuples arabes. Ces peuples sont devenus membres des Nations Unies,
avec tous les droits afférents à cette qualité. Ils
font entendre leur voix dans toutes les délibérations internationales.
Il faut- donc connaître et tenir compte de leurs credo politiques
et sociaux en vue d'établir l'ordre, la paix et la
démocratie dans le monde.
On sait avec plus ou moins de détails que les Arabes
du Proche et Moyen-Orient ont collaboré avec l'Axe pendant la guerre.
Cependant, pour des raisons multiples, la plupart des actions diplomatiques
concernant le Proche-Orient ne tiennent pas compte de cette période-
« regrettable •>, de sorte que les officiels arabes ont put s'imaginer
que l'activité de leurs peuples en faveur des nazis
est oubliée.
Bien plus, ils réclament des récompenses pour la prétendue
aide qu'ils auraient fournie aux démocraties ! Devant cette étonnante
déformation des faits historiques, nous croyons avoir l'impérieux
devoir de publier des documents sur l'effort de guerre des Arabes, qui
ne parviendraient pas autrement sous les yeux du public.
On ne peut nier (et tous les observateurs s'accordent
sur ce point) qu'avant la guerre, les Arabes
du Proche-Orient
éprouvaient une vive sympathie pour les pays de l'Axe, et une hostilité
non déguisée à l'égard des Britanniques. Ces
sentiments imprégnaient, la grande masse des peuples arabes, pendant
que les chefs collaboraient souvent ouvertement avec l'Axe. Les idéologies
fascistes et nazies suscitaient un écho direct et facile dans le
monde arabe; elles s'adaptaient à des formes de pensées parallèles,
toutes prêtes à les accueillir; elles trouvaient des cadres
matériels tout faits dans les clubs politiques existants.
Cette
prédisposition au fascisme était favorisée dès
avant Munich, par la politique d'« apaisement » pratiquée
par les Britanniques dans le Proche-Orient. Les
Britanniques croyaient
qu'il fallait se concilier à tout prix les éléments
hostiles, c'est-à-dire les extrémistes arabes, et qu'on pouvait
se permettre de ne pas tenir compte des modérés, puisque
ceux-ci ne menaçaient pas les intérêts britanniques.
Parmi ces modérés,'il y avait de véritables démocrates,
comme le Dr. Shahbandar, de Damas. Ainsi, l'argent dépensé
par les Britanniques pour se concilier la faveur des Arabes vint surtout
dans les poches de quelques leaders extrémistes, pour la plupart
fascistes. On gaspillait des sommes énormes au lieu de gagner les
masses par l'amélioration des conditions sanitaires, de l'éducation,
du bâtiment ; on fortifiait au contraire le crédit des chefs
extrémistes, on accréditait leur « infaillibilité
» en cherchant à s'insinuer dans leurs bonne grâces.
Après le début de la guerre, les promesses
de la propagande et les succès militaires allemands firent une impression
profonde sur les masses arabes, sans maturité politique. Les Arabes
restèrent longtemps convaincus de la victoire finale de l'Axe. Les
Britanniques accueillirent favorablement certaines revendications politiques
arabes légitimes. On y vit de la faiblesse. Par contre, la brutalité
nazie dénoncée par la propagande alliée frappa les
musulmans comme le signe éclatant de la puissance allemande et
leur persuada qu'il était sage de se ranger aux côtés
du vainqueur. Les quelques rares leaders arabes
favorables aux Anglais durent taire leurs opinions et se donner
pour anti-britanniques, afin de garder la confiance de leurs troupes.
Les sentiments du monde arabe pendant la guerre sont mis
on évidence dans les lignes suivantes écrites par un anglais
compétent en la matière, Glubb Pasha, commandant de la «
Légion Arabe de Transjordanie ». Voici, ce qu'il écrit
sur la révolte d'Irak de 1943 :
« Les Anglais ont toujours su qu'ils gagneraient
la guerre ; mais à cette époque, chaque Arabe était
profondément convaincu crue c'en était fait de la Grande-Bretagne pour toujours, et que l'occupation des pays arabes par
les Allemands
n'était plus qu'une question de semaines. Si les Irakiens n'avaient
été parfaitement sûrs de leur fait, ils ne nous auraient
pas déclaré la guerre...
En un mot, pendant le mois qui précéda la
prise de Bagdad, chaque Arabe savait que nous étions perdus. Toutes
les troupes arabes que nous avions organisées se sont mutinées,
ont refusé de combattre pour nous, ou, plus simplement, ont déserté.
Seuls les hommes de la Légion Arabe nous sont demeurés fidèles.
Ils ont même joué un rôle- actif, énergique,
appréciable dans notre petite campagne
» (1)
En février 1945, lorsque la guerre approchait
de sa fin, et que l'issue n'en faisait plus de doute, l'Égypte, l'Arabie
Séoudite, la Syrie et le Liban déclarèrent la guerre
à l'Allemagne. Les déclarations de guerre de la 11e heure
demeurèrent lettre morte : aucun de ces États ne prit une part directe
aux opérations militaires. Ces actions, tout platoniques, étaient
destinées de toute évidence à donner à ces
pays des sièges à l'ONU où seules pouvaient participer
les nations ayant déclaré la guerre à l'Axe avant
le 1 mars 1945.
Un seul pays arabe déclara la guerre à l'Allemagne
des 1939 : la TransJordanie. Ce pays n'était
(1) Appendice du «Golden Carpet
» de Somerset D. Chair. Harcourt, Brace et Gie. New-York
1945, page 243
pas encore indépendant. Sous mandat britannique il se trouvait
tributaire (et l'est toujours) des crédits britanniques dont dépendait
entièrement son armée, la Légion-arabe. L'Irak déclara
la guerre à l'Allemagne en 1943, quand EI-AIamein eut renversé
la balance en faveur des Alliés. Cette déclaration de guerre
devait atténuer la signification du coup de poignard dans le dos,
que l'Irak avait donné aux Anglais en 1941.
L'attitude générale des États arabes n'était
que la suite logique des relations qui existaient de longue date entre
certains mileux arabes fit l'Axe. Avant la guerre, de nombreux étudiants
arabes avaient visité l'Allemagne et l'Italie. Des politiciens allemands
étaient venus dans le Proche-Orient, l'argent allemand et italien
avait afflué en même temps que les journaux de propagande.
Les radios de l'Axe faisaient preuve d'une sollicitude particulière
pour leurs auditeurs de langue arabe. Toutes ces activités avaient
préparé les esprits et la moisson /leva pendant la guerre.
En ce qui concerne la Palestine, on sait maintenant que les troubles de
1936-39 avaient été fomentés et financés par
l'Axe. Le Mufti de Jérusalem était en contact avec Mussolini
depuis des années, par l'intermédiaire de son agent à
Genève, l'Emir Shekib Arslan. On a pu intercepter une partie de
leur correspondance secrète. Des journaux arabes opposés
au Mufti en ont publié, des extraits dès 1935.
Syrie et Liban.
Certains groupes de leaders syriens étaient en
relations continues avec l'Axe depuis longtemps:. II existait avant guerre
plusieurs organisations nazies arabes : les Chemises de Fer (dirigées
par Fakhri Al-Barudi, du Bloc National, membre de l'actuel Parlement syrien)
; la Ligue pour l'Action Nationale (dirigée par Abu al-Huda al-Yafi,
le Dr. Zaki al-.Iabi et d'autres) ; le Club An-Nadi al Arabi à Damas
(dirigé par le Dr. Said Abd al-Fattah al-ïindn)
STALINGRAD
SI LA RÉVOLTE D'IRAK AVAIT RÉUSSI
planche !
; le Conseil de Défense de la Palestine arabe-(dirigé
par des leaders pro-nazis comme Nabih al-Azma, Adil Arslan et d'autres)
; le Parti Populaire Syrien (dirigé par le fasciste
Anton Saada,
qui réussit à fuir en Allemagne pendant la guerre et fut
envoyé par les Nazis en Argentine) ; le bloc National, premier parti
syrien et le groupe Istiqlal (dirigé par Suhkri al-Kuwatli, actuellement
Président de la République syrienne) exprimaient ouvertement
depuis plusieurs années leur sympathies nazies (1). Avant la guerre,
Baldur von Schirach, Fuhrer de la HitlerJugend, vint en Syrie en mission
spéciale. Il prit contact avec les milieux fascistes, particulièrement
avec le club An-Nadi al Arabi, et avec les Organisations de jeunesse arabe.
Irak.
La xénophobie fut toujours le trait caractéristique
de la mentalité politique des leaders irakiens. Les groupes soi-disant
pro-britanniques n'en ont jamais été tout à fait exempts.
L'armée, entièrement gagnée aux idées nazies
dès avant la guerre, joue un rôle important dans les affaires
de politique intérieure et étrangère du pays. Comme
en Syrie, il existait, en Irak avant la guerre, un grand nombre d'associations
fascistes entretenant des relations étroites avec l'Ambassadeur
du Reich, le Dr. Grobba. Parmi ces associations, citons le Club Al-Muthanna,
fondé par le Dr. Amin Ruweiha, Said Thabit, et d'autres, et le Club
AKFutuwa, qui envoyait des délégués aux manifestations
de Nuremberg. Pendant la première période de la guerre, des
hommes politiques .irakiens étaient en contact avec les ambas-
planche II
(1) Voir en appendice (document N° I ) une nomenclature des partis
politiques syriens, extraite d'un manuel militaire britannique publié
par le Quartier Général britannique du Moyen-Orient à
l'usage de ses troupes, avant l'invasion de la Syrie en juin 1941.
sades allemandes à Bagdad et Ankara. Naji Shaw-kat, politicien
irakien, servit à von Papen d'agent de liaison avec-les milieux
arabes du Moyen-Orient (1)
Au début de la guerre, l'Irak donnait asile à
un grand nombre de réfugiés politiques ; la plupart, qui
venaient de Palestine, haïssaient les Britanniques, et étaient
en rapport avec les Allemands. Parmi eux on comptait Daud al-Husseini,
Is'haq as-Salah al-Husseini, Amin Tamini, Hasan Abu Saud, Hadj Amin al
Husseini, Jamal
al-Husseini, Munif al-Husseini, Fawzi Qauqji, Izz-ad-Din ash-Shawa, Is'haq
Darwish, Dr. Amin Ruweiha, Salim. Abdur Rahan, Darwish Naqdali, et beaucoup d'autres. Le Gouvernement Irakien les aida à
propager leurs doctrines en les introduisant dans le peuple : plusieurs
furent notamment instituteurs.
Haj Amin
al-Husseini, l'ex-Mufti de Jérusalem
était l'âme du groupe. Il était venu de Syrie
en Irak en octobre 1939. Le premier ministre d'Irak, Nuri Said, lui fit
un accueil officiel avec la pompe et le cérémonial réservés
aux héros. Le 22 octobre, Nuri Said donna un banquet en son honneur
où assistèrent, des membres du Cabinet, les présidents
de la Chambre des Représentants et du Sénat, Rachid Aliel-Kailani,
et de nombreuses autres personnalités. Ce banquet marqua le début
d'une série de réceptions où l'on vit à côté
de Taha el Hashimi, Ministre de la Défense, l'actuel ministre d'Irak
à Washington, Ali Jawdat el Ayyubi.
L'hospitalité du Gouvernement irakien ne se borna
pas à des banquets. Le Parlement vota un don de 18.000 livres pour
le Grand Mufti, et on lui fit par la suite une rente mensuelle de 1.000
livres provenant des fonds du Service secret irakien. A cela, s'ajoutaient
les 2% retenus à la base de tous les salaires des fonctionnaires d'Etat, y compris l'armée et la police, qui allaient automatiquement
au Mufti. Outre ces « traitements », le public irakien donna
des sommes importantes au Croissant Rouge et à la « Société
de Défense de la Palestine » afin que Hadj Amin et sa suite
puissent vivre clans le luxe auquel ils étaient accoutumés.
Hadj Amin mit en œuvre un programme d'action (l). Sa première
œuvre fut l'organisation des réfugiés de Palestine et des
réactionnaires syriens gravitant autour de lui, en un groupe actif
et efficace. Il réalisa une pénétration dans le
gouvernement
irakien en installant ses alliés palestiniens et syriens dans des
emplois publics. En même temps, Hadj Amin étendit son empire
sur certaines organisations nationalistes d'Irak, dont plusieurs recevaient
déjà l'appui et l'argent de l'Allemagne. Leur caractère
fasciste en faisait les victimes consentantes de ses intrigues.
Dès son arrivée en Irak, Hadj Amin renoua
contact avec les agents de l'Axe. On sait de source autorisée qu'il
était payé 60.000 livres par les Allemands et 40.000
livres par les Italiens
Les événements ultérieurs ont montré
que l'intrigue la plus importante que l'ex Mufti ait nouée en Irak,
fut sa collusion avec Rachid Ali el-Kailani et les quatre officiers généraux
de l'armée iraquienne surnommés le « carré d'or
», Le Mufti poussait ces officiers, qui ne cachaient pas leurs sentiments
anti-britanniques et pro-nazis, à s'immiscer dans la politique du
Gouvernement. D'ailleurs, les sentiments de ces hommes étaient partagés
par la majorité des officiers qui ne doutaient pas de la victoire
allemande. Les militaires étaient convaincus que la politique pro-britannique
de Nuri Said compromettrait l'Irak lorsque l'Axe aurait gagné la
guerre. Le 31 mars, Nuri Said fut forcé à se retirer et
l'armée nomma Rachid
Ali el Kailani premier ministre.
(1) Voir en appendice (document N° 2 ) : un rapport
officiel britannique intitulé « Brève histoire de l'activité
ennemie en Irak », 1935-41, publié par le « Defence
Semmty Office», CICI Bagdad, 11 avril 1945. (1) Cf. Document 3 : « Le rôle à.l'ex-Mufti dans
la révolte d'Irak » rapport de l'Intelligence Service britannique
(G. S. I.) 1 Dec. 1941.
11
Cette manœuvre marque le début de la participation
active de l'Irak à l'effort de guerre nazi. Dès que l'armée
détint les rênes du gouvernement, la révolte put éclater.
Elle éclata en effet en avril 1941 (1).
La révolte d'Irak.
Avant la révolte
d'Irak, et tant que l'issue de
la guerre paraissait incertaine, les gouvernements arabes avaient suivi
une ligne de conduite prudente à l'égard des belligérants.
Ils évitaient soigneusement tout acte qui put mécontenter
les Alliés ou l'Axe.,
Lorsque la guerre éclata, les Etats Arabes rompirent
les relations diplomatiques avec l'Allemagne. Mais quand l'Italie entra
en guerre eu poignardant la France, les Etats Arabes ne songèrent
pas à rompre avec Mussolini, puisque
Mussolini
était dans
le camp des « vainqueurs ». Pendant les premières années
de la guerre, les ambassades d'Italie au Caire, à Bagdad et dans
d'autres villes furent des centres actifs d'espionnage et d'intrigues anti-britanniques.
Plusieurs gouvernements arabes trempèrent dans les complots des
diplomates italiens et de agents nazis en dépit des protestations
répétées des Britanniques.
La révolte d'Irak éclata lorsque l'issue
de la guerre ne paraissait plus faire de doute. Au printemps 1941, les
chances britanniques semblaient réduites au minimum. Ni l'URSS ni
les Etats-Unis n'étaient encore en guerre. Tout le poids de l'Axe
pesait avec fureur sur la Grande-Bretagne seule. Les troupes britanniques
évacuaient la Grèce. En Syrie le régime vichyssois
collaborait avec la Commission d'armistice germano-italienne, et préparait
l'invasion du Proche-Orient par les Allemands.
(1) Quoique la révolte eut éclaté
en avril, le Gouvernement Irakien ne déclara la guerre à la Grande-Bretagne qu'en mai. En
Érythrée, les forces de l'Axe progressaient. Nous
avons cité les observations du Général Glubb sur la
foi arabe dans la victoire de l'Axe. Les Irakiens, dit-il, en étaient
parfaitement convaincus lorsqu'ils se soulevèrent contre la Grande-Bretagne,
Cette révolte faisait partie de la stratégie
allemande. Si les Irakiens avaient réussi à placer leur pays
dans l'orbite de l'Axe, les Alliés auraient non seulement perdu
leurs principales sources de pétrole (Irak et Iran), mais il en
aurait résulté des conséquences beaucoup plu? graves.
L'empire Britannique se serait trouvé coupé en deux. La portion
occidentale de l'Empire aurait été coupée de l'Inde,
source de matières premières ; l'Inde et les relions du Pacifique
avec ses armées en campagne se seraient trouvées isolées
et privées de renfort. Hitler aurait pu battre ces deux fractions
d'Empire, chacune séparément. Les Allemands auraient opéré
leur jonction avec les Japonais qui s'y étaient préparé
en provoquant, la révolte de Subhas Bose dans l'Inde. Les Russes
auraient été débordés par l'invasion du Caucase,
opérée à partir de l'Irak. El-Alamein et Stalingrad
auraient été des victoires de l'Axe (voir plancha 1).
Les rebelles d'Irak, préparés et aidés
par I'ex-Mufti de Jérusalem, avaient choisi pour se soulever an
moment particulièrement critique pour les Britanniques. Pendant
deux mois, la lutte resta indécise.
Les Britanniques firent venir à la hâte des
troupes de l'Inde. Une colonne partie de Palestine
se dirigea à
marches forcée sur Bagdad. Les rebelles de leur côté
mirent en ligne des avions allemands et italiens opérant à
partir d'aérodromes de Syrie. La Commission d"armistice germano-italienne
ordonna au Général Dentz, Haut-Commissaire vichyssois en
Syrie et au Liban, d'envoyer des armés en Irak par trains entiers.
L'appel de Hadj Amin et des militaires irakiens fut. entendu et suivi par
tous les éléments troubles du Proche-Orient (1).
(1) Voir document 4 : « Appel à la guerre sainte contre
12
au Gouvernement libanais qu'ils désiraient former une unité
combattante. Plusieurs complices actifs des révoltés d'Irak
(comme Adil Arslan, Nabïh al-Azma et d'autres) sont rentrés
récemment de Turquie et d'Allemagne et ont repris leurs activités
politiques (1). La plupart sont devenus chefs ou membres des gouvernements
syrien et libanais : Shukri al-Kuwatli, Riad as-Suhl. Habib abi Shah la
Emile Lahukï, Sabri aî-Asali et Farid Zayn-ad-Din.
Palestine et Transjordanie.
La propagande anti-britannique en Palestine se traduisait
tout d'abord par des mots d'ordre chuchotes à couvert et des tracts
diffusés parmi les Arabes. Puis, on tenta de recruter des agents
actifs pour Kailani. Mais cette campagne n'eut pas grand succès.
La révolte tournait court : et les Arabes de Palestine étaient
lassés par les années de terrorisme qui venaient d'ébranler
le pays. La contribution essentielle de la Palestine au régime Kailani
fut l'activité de propagande et de noyautage parmi les Arabes palestiniens
émigrés en Irak. Nous analyserons plus loin les activités
d'espionnage, de sabotage et le recrutement en faveur de l'Axe dirigés
par Haj Amin el Husseini et sa séquelle, opérant en Irak
d'abord, en Italie et en Allemagne après l'échec de la révolte.
En TransJordanie, on organisa de grands meetings de propagande
et des manifestations en faveur de l'Irak. On fournit
aussi à Kailani une assistance
(1) Quoi d'étonnant ! Le Mufti retrouvé
en zone française en Allemagne après l'écroulement
du nazisme, réclamé comme criminel de guerre par la
Yougoslavie, put vivre sans être inquiété en France
et gagner l'Egypte. Plus récemment Fawzi Bey el Qauqji, l'un des
responsables des troubles de 1936-39, se posait sur l'aérodrome
de Lydda, et la police britannique ne l'inquiéta nullement fidèle
aux Britanniques. On fit une large publicité à ce trait
de loyalisme.
Les désertions d'hommes de troupe et d'officiers
furent nombreuses. Les radios nazies et les tracts de la 5e Colonne encourageaient
sacs cesse les Arabes du Proche et Moyen-Orient à quitter les rangs
des Alliés.
La propagande des leaders arabes en Allemagne s'élevait
vigoureusement contre l'enrôlement des Arabes
dans l'armée britannique. Propagande presque superflue. ( car le
nombre d'engagés volontaires arabes en Palestine fut si minime,
que les autorités encourageaient même les Syriens, Libanais et Trans-jordaniens
à passer la frontière et s'engager en Terre Sainte
pour que le chiffre prévu pour
les unités arabes de Palestine fût atteint. ïl
faut rappeler que l'administration palesinienne desservit singulièrement l'effort de guerre allié
en limitant le nombre d'engagés juifs des unités
d'infanterie au nombre d'engagés arabes, alors que les
Juifs se présentaient bien plus nombreux que les
Musulmans. Ce souci d'équilibre saugrenu,
inventé par une administration
bornée, céda finalement aux
instances continuelles des volontaires juifs. D'ailleurs, la situation
militaire était très
grave dans le Proche-Orient. Une statistique
donnée aux Communes par le Secrétaire ,le 2 avril 1945, précisait que 25.714 Juifs palestiniens
servaient dans les armées britanniques contre 9.041 Arabes.
De nombreux soldats arabes de Palestine passèrent
à l'ennemi. Parmi les prisonniers faits par les Allemands, un grand
nombre s'enrôlèrent dans le» Brigades arabes de
la Wehrmacht. Pendant leur campagne en Europe, les Alliés trouvèrent
des Arabes en uniforme allemand : ces hommes avaient servi
précédemment dans l'armée
britannique.
Face à l'ennemi, beaucoup désertèrent.
Des centaines de soldats arabes quittaient leurs unités avec leurs armes.
L'Armée britannique perdit la moitié des Arabes incorporés en Palestine : les uns
désertèrent ; les
autres furent licencié* parce qu'inaptes au
service.
18 L'Egypte et la guerre.
L'Egypte était directement mis en cause par la
déclaration de guerre de l'Italie puisqu'elle possède une
frontière commune avec les anciennes colonies italiennes d'Afrique
du Nord. Cependant, le Gouvernement Egyptien ne déclara pas la guerre
à son tour. Il se contenta de rompre les relations diplomatiques
et permit au corps diplomatique et à 35 sujets italiens de quitter
le territoire égyptien sans escorte. Les Anglais demandèrent
ù vérifier les papiers de ces individus. Aîi Maher,
premier ministre, n'en voulu!, rien savoir. Un certain nombre d'Italiens
furent internés en Egypte, mais on accorda par ailleurs la citoyenneté
égyptienne à un Italien suspect d'espionnage. C'était
un homme qui avait ses entrées à la cour. On connaît
les sympathies pro-italiennes du roi Farouk. Ce n'est pas sans raison que
Victor-Emmanuel s'exila en Egypte après sa chute.
L'Egypte adopta une attitude bienveillante envers le régime
de Vichy. Ce n'est qu'en 1942 que le gouvernement rompit les relations diplomatiques avec Pétain, sous la pression britannique.
Personne, en Egypte et élans les autres pays arabes,
n'ignorait les tendances anti-britanniques et pro-fasciste de la
cour égyptienne. La presse égyptienne affichait hautement
son attitude anti-britannique. Les mots d'ordre diffusés par les
radios arabes de Berlin, Rome, Bari ou Athènes étaient repris
au Parlement égyptien et dans la presse du Caire. On accusait les
Britanniques d'épuiser les approvisionnement du pays et de réduire
les pauvres à la famine ; en réalité l'armée
britannique dépensait en Egypte des millions de Livres sterling. (en constructions
militaires notamment) et sauvait de la mort, en leur payant des salaires
très élevés, des milliers de fel-lahim. Les Alliés
ont dépensé en Egypte 350 millions de L. st. pendant la guerre
: 1,5 billion de dollars (ISO billions de francs). De même, on rendait
responsables les britanniques de la crise du coton, alors que l'Egypte
n'aurait pas vendu une seule balle si la Grande Bretagne n'avait acheté
toute la récolte.
19 On sait comment les Britanniques durent faire appel
à la force en février 1942 pour contraindre les Egyptiens
à former un gouvernement quelque peu loyal à la cause alliée
(1).
Nous trouvons dans « Akhbar el Yom » un récit
de ces événements. Les chars britanniques
encerclèrent le palais Abdin et des milliers
de soldats en armes occupèrent les points importants dans le voisinage.
Un char défonça la grille du palais. Lord Killearn, ambassadeur
britannique et le commandant en chef des troupes britanniques en Egypte
s'avançaient derrière le char. On neutralisa la garde royale
et l'ambassadeur se fit accompagner dans le bureau du roi pas des officiers
armés. Toutes les lignes téléphoniques du palais avaient
été coupées et les postes de police encerclés
par les Britanniques. Sous cette pression, le roi convoqua les chefs des
partis et les doyens des hommes d'état, II leur dit : « Vous
avez vu les chars anglais. Je suppose que vous conviendrez avec moi
qu'il est de l'intérêt du pays d'accepter un changement de
Gouvernement. » Nahas Pacha fut chargé de former le nouveau
cabinet. Il déclara plus tard : « Ceux qui étaient
au pouvoir à cette époque étaient convaincus que l'Axe
gagnerait la guerre. Ils avaient misé sur le mauvais cheval. Les
relations avec les Britanniques étaient devenues extrêmement
tendues. Nous avons eu des démonstrations de masse contre
la Grande-Bretagne aux
cris de « Vive Rommel
».
Certes, l'Egypte de Nahas Pacha ne déclara pas
la guerre à l'Axe. Mais du moins on ne vit plus de soldats britanniques
assassinés dans les rues ; et l'arrestation^ de centaines d'Egyptiens
(politiciens officiers, étudiants, fonctionnaires) mit fin au sabotage
des lignes de communication.
Les chefs successifs du Gouvernement Egyptien, AIî-Mahcr,
Hasan Sabri, Husein Sirri et Mustafa Nahas avaient
affirmé à plusieurs reprises
qu'ils
(I) L'événements sont évoqué
par Nahas Pnsha dans un discours reprofM.nl1. par AJ-BoIii^h le M novembre
1945,
22 déclareraient la guerre lorsque le territoire égyptien
serait foulé par les Allemands ou les Italiens. Pourtant, on n'en
fit rien, alors même que les armées de l'Axe étaient
enfoncées profondément en Egypte. Au lieu de répondre
aux bombardements allemands de villes égyptiennes par une déclaration
de guerre, le Gouvernement égyptien pressait les autorités
militaires britanniques d'évacuer Le Caire et de déclarer
la capitale ville ouverte. En 1942, la B. B. C. annonçait que l'Egypte
était sur le point de déclarer la guerre et de mobiliser
un-demi million d'hommes : Nahas Pacha lui-même s'empressa de démentir
l'information. Il chargea l'ambassadeur d'Espagne de porter ce démenti
aux gouvernements de l'Axe, et de leur réitérer l'assurance
de la neutralité égyptienne.
L'armée égyptienne ne joua qu'un rôle
insignifiant dans la guerre, et loin du front. Ce rôle consistait
à garder des bâtiments, des nœuds de communication. Mais à
l'époque d'El-Alamein, les Britanniques durent la relever de ces
tâches insignifiantes. Nahas Pacha avait exigé que les Britanniques
abandonnent tous leurs points fortifiés en Egypte afin, disait-il,
d'épargner au peuple égyptien des souffrance» au cas
où les allemands venaient à occuper Alexandrie. Il y a lieu
de croire que les commandants des 8e et 9e Armées britanniques aient
reçu des ordres d'évacuation à appliquer le cas échéant.
En dehors de l'armée égyptienne, une armée
territoriale fut constituée et placée sous les ordres d'Abdul
Kahman Azzam (l). Lorsque les autorités militaires britanniques
connurent les relations de ce chef avec Ah' Maher, elles comprirent que
cette armée, loin d'épauler les forces britanniques en Egypte
deviendrait le noyau de la 5e colonne. Elles n'obtinrent sa dissolution
qu'après de longs efforts.
Il n'y eut qu'un seul homme d'état en Egypte pour
affirmer la nécessité de déclarer la guerre à
l'Allemagne : Ahmed Maher Pacha. Etant premier
(1) Aujourd'hui secrétaire général de la Ligue Arabe.
23
Ministre, il réussit finalement à obtenir cette déclaration.
C'était en février 1945, à la veille de la Conférence
de San Francisco. Mais Ahmed Maher venait de signer son arrêt de
mort. Après avoir annoncé la décision à la
Cambre, il voulut se rendre au Sénat. Un avocat égyptien
l'abattit d'un coup de revolver dans la rue.
Syrie-Liban.
Le régime vichyssois permettait toute propagande
anti-britannique en Syrie et au Liban,
et toutes sortes de relations avec les pays de l'Axe.
La 5e colonne n'avait nul besoin
d'opérer à l'ombre ; les menées
fascistes pouvaient se dérouler au grand jour. II
n'y avait de favorable aux Britanniques et d'anti-nazi
qu'un seul groupe : celui du Dr. Ab-dur-Rahman Shabandar. Mais,
dès 1940, les nazis syriens s'empressaient
d'assassiner le Dr. Shabandar, et sa mort entraîna la
dissolution rapide du groupe dont il avait été l'âme.
L'opinion publique accusait de ce meurtre Ios
chefs du Bloc National Syrien — qui sont aujourd'hui
à la tête de la Syrie. En effet, trois des principaux chefs
du Bloc s'enfuirent à la hâte au surlendemain
do meurtre et trouvèrent refuge en Irak auprès de Kailani,
et plus tard en Arabie Séoudite. Après l'occupation
de la Syrie par hs Britanniques, on leur permit de revenir et de reprendre
leurs postes. En effet, Ibn Séoud avait intercédé
en leur faveur auprès de l'ambassadeur britannique en
Irak, sir Kinahan Cornwallis (1). Sous
le régime vichyssois, le siège de la Commission d'armistice
germano-italienne devint le. centre de la vie politique syrienne. La Syrie
servait de pont entre les Etats arabe? de la sphère d'influence
britannique d'un côté, l'Irak et l'Axe de l'autre.
(î) Le caractère nazi des parfis politiques
syrien» et libanais est mis en évidence par un document officiel
britannique. Voir Page 38.
u Lors de l'avance britannique en Syrie, plusieurs leaders arabes offrirent
spontanément leur aide au Général Dentz pour repousser
l'attaque. Nous avons parlé plus haut du soutien qu'ils donnèrent
aux révoltés d'Irak. Et, parmi ces chefs syrien il y avait
non seulement des nationalistes impénitents, mais encore de soi-disant
leaders « progressifs ». A côté de politiciens
vieux-jeu comme Shukri Kuwatli (aujourd'hui président de la République
syrienne) on trouvait Raif el Khoury, un écrivain et homme politique
de gauche. Pour lui, la révolte d'Irak était un soulèvement
de paysans et d'ouvriers contre leurs oppresseurs. C'est la thèse
singulière qu'il défendit dans un livre publié à
Beyrouth.
L'occupation britannique ne fit pas cesser l'activité
nazie en Syrie et au Liban. La plupart des leaders nazis avaient pris la
fuite (Nabih al-Azma, Izzat Darwaza, Adil Arslan etc.). D'autres purent
être appréhendés (comme Ihsan al-Jabri, frère
de l'actuel chef du gouvernement syrien). Mais beaucoup de leaders demeurèrent
sur place, ne furent pas inquiétés, et poursuivirent leurs
activités clandestinement. On découvrit que les étudiants
syriens libanais et palestiniens de l'Université américaine
de Beyrouth se livraient à l'espionnage pour le compte de l'Allemagne.
Plusieurs de ces étudiants ont été fusillés.
Hadj Amin al Husseini et les émigrés.
Les politiciens syriens et libanais ne furent pas seul
à soutenir la politique de l'Axe. La plupart des palestiniens groupés
autour de l'ex-Mufti de Jérusalem et les Irakiens compromis dans
lo régime Kailani en 1941 passèrent les dernières
années de la guerre dans 1s pays de l'Axe ou en territoires neutres
où ils organisaient en faveur de rAllemagne> de l'Italie et du Japon,
l'espionnage et la 5e Colonne.
Parmis les palestiniens, il faut nommer Nasan Abu Saud,
Salim Abd ur-Rahman, Mysa Abdullah Husseini, Arif
Abid ur-Raziq, Saad ad-Dîn
al-Latif, Ftasixn al-Khalidi, Is'haq Darwish, tous impliqués
dans les troubles de 1936-39. Parmi les Egyptiens vivant dans les pays
de l'Axe pendant la guerre, citons Je prince Mansur Dawud (un parent du
roi d'Egypte), Mustafa al-Wakil (l'un des chefs du Mouvement Misr aï-Fatat),
et le Dr. Tayib Nasr. Parmi les Irakiens (la plupart chefs de la révolte),
qui fuirent en Allemagne : Rachid Ali
EI-Kailani, Naji Shawkat, Yunis aî-Bahri et Fawzi Oauqji, l'un
des leaders militaires ries troubles de I93G en Palestine. Un groupe de
chefs arabes travaillaient pour l'espionnage allemand en
Turquie. Ils envoyaient eu Allemagne des
renseignements recueillis par leurs agents
dans les différents pays arabes. Parmi eux : Izzat Darwaza, Akram Zuytar, Muin
al-Madi, Adiï Arslan, Adil al-Asma, Natub al-Azma.
Un autre groupe de chefs arabes ne réussirent pas
à atteindre l'Allemagne, mais furent arrêtés
par les autorités britanniques en Iran envoyés en Rhodésie.
Ce groupe comprenait le Dr. Amin al-Ruweilha, le Dr. Daud ai-Husseini,
Kamal Hadda, et Jamaï al-Husseini, à qui l'on permit de rentrer
en Palestine en 3946. D'autres furent arrêtés par hs Britanniques
en Syrie, au Liban, on Palestine et en Egypte ; et en
Irak par les autorités de ce pays.
Parmi ces émigrés Hadj Amin al Husseini
joua un rôle de premier plan. N'ayant pas réussi a assurer
des bases à l'Axe en Irak, il passa en Iran en mai 1941 et trouva
refuge à l'ambassade japonaise de Téhéran. Lorsque
In putsch nazi des Iraniens échoua, Hadj Amin s'enfuit à
nouveau au moment où les colonnes britanniques et russes se rencontraient
à Téhéran. L'ex-Mufti avait une longue expérience
des disparitions rapides : en 1920, condamné à dix ans de
prison par un Tribunal militaire britannique pour avoir provoqué
un pogrome à Jérusalem,
il passa en TransJordanie ; en 1937, sur
le point d'être arrêté par les Britanniques
pour le meurtre de milliers d'Arabes, d'Anglais
et de Juifs pendant les troubles de 1936, it quitta les Lieux Saints pour
le Liban. En 1941, à Rome, Hadj Amin se vantait devant un correspondant
du "Volkischer Beobachter" que le général
Wavell avait mis sa tête à prix pour 25.000 livres sterling.
En octobre 1941; Hadj Amin atteignit l'Italie et discuta
avec Mussolini, Ciano, cl Dino Alfieri, des possibilités d'une collaboration
des Arabes et des Italiens. De Rome, il communiqua avec les Musulmans des
Balkans sous domination italienne, en Yougoslavie et en Albanie.
Lorsqu'il se rendit compte que Mussolini était
sous l'étroite dépendance de
Hitler, Hadj Amin partit pour
Berlin. C'était en décembre 1941. Tl établit son quartier
général dans la capitale du Reich. Il fut reçu par
Hitler, et élabora son plan d'action future avec des chefs politiques
et militaires allemands comme Ribbentrop, Grobba et Wuitzacker. On établit
un bureau spécial pour lui appelé « Bureau du Grand
Mufti » (1) à Berlin et plus tard à Oybin-avec plusieurs
succursales en Allemagne et en Italie. Ses activités portaient sur
:
1. La Propagande
2. Formation d'une 5e colonne dans le Proche-
Orient (sabotages et commandos parachutés)
3. Espionnage
4. Incorporation de Musulmans
dans la Wehr-
macht, dans les pays occupés par l'Axe, en
Afrique du Nord et en Russie.
5. Création de la Légion Arabe et de la Brigade
Arabe.
Voici une analyse succinte de ses activités :
PROPAGANDE. — Hadj Amin prononça à plusieurs
reprises des allocutions radiodiffusées sur les stations contrôlées
par les Allemands. 11 avait à sa disposition les émetteurs
de Berlin, Zeissen, Bari, Rome, Tokyo (2), Athènes,
etc. II faisait appel
(1) Voir document photographique planche TH.
(2) Voir document photographique planche III : l'arrangement
entre le Mufti et l'Ambassade japonaise à Rome sur les discours
de Hadj Amin retransmis à Tokyo.
(1)
aux Arabes de Palestine et aux Musulmans du monde entier,
y compris ceux des Etats-Unis (J), de s'insurger contre les Alliés,
de rejoindre la 5e Colonne, de commettre des actes de sabotage et de tuer
les Juifs. Plusieurs membres de son Etat-Major se consacrèrent
à la propagande par TSF. Pendant
les heures les plus sombres de la guerre, en 1941-43,
les discours de l'ex-Mufti
firent une impression profonde parmi les
Arabes du Proche-Orient. Hadj Amin envoyait également dans
le Proche Orient des journaux de propagande et des pamphlets en Arabe
ESPIONNAGE. — En son quartier général à
Berlin ou a Oybin, Hadj Amin organisait un réseau d'espionnage.
Sa succursale de Genève (dirigée par le nazi notoire Emir
Shelcib Arslan) lui servait de relais entre l'Allemagne et ses agents en
Egypte et en Turquie. Il avait une autre succursale à Istanbul,
avec des postes le long de la frontière turco-syrienne, à Mersine, Alexandrette, Antioche, Adana et
Diarbe-kir. Ces succursales
recevaient des renseignements directs des agents du Mufti en Palestine,
Syrie et Irak, et étaient en contact étroit avec les agents
de l'espionnage allemand travaillant en Turquie : Hoffman, consul général
d'Allemagne à Adana, Paula Koch à Alexandrette, Rudolf Von
Roser, Chapeau-rouge à Stanboul, Von Hentig, etc..
Cette organisation permit aux Allemands de recevoir des
renseignements militaires importants sur les mouvements de troupes britanniques.
Des informations sur des sabotages des Arabes ou les soulèvements
comme celui du Transjordan Frontier Force, quoique strictement censurées
par les Britanniques dans le Proche-Orient, parvenaient immédiatement
en Allemagne et étaient annoncées par la radio de Berlin.
Nous avons mentionné plus haut comment plusieurs émetteurs
clandestins des amis du Mufti.
(1) Voir document N° 5 (appel aux Arabes d'Amériques
radiodiffusé de Rome le 19 mars 1943. (Page62J 28
furent découverts et les
opérateurs exécutés ou condamnés
à des peines d'emprisonnement.
CINQUIEME COLONNE. — Le Mufti mit sur pied une vaste organisation
de 5e Colonne. Il établit à Athènes une école
de parachutistes et de, saboteurs pour Arabes. ï! existait à
La Haye une école d'opérateurs de TSF où l'on enseignait
également la démolition et l'usage des explosifs aux «
étudiants » arabes.
Les agents de Hadj Amin s'infiltraient dans le Proche-Orient
par la Turquie, la Syrie ou l'Irak, ou plus simplement, étaient
parachutés. Les Britanniques découvrirent plusieurs commandos
de parachutistes et purent s'emparer des hommes avec tout leur équipement
: explosifs, armes, munitions, caméras, émetteurs, sommes
en or. Parmi ces expéditions citons les raids de Jéricho,
de Tel Afar (1) en Irak, et d'autres expéditions dans le Nord de
la Syrie (Alep, Gezira et Damas). L'un des membres de l'expédition
de Jéricho en octobre 1944, Thuc-qlifl, fut capturé ; un
autre, Hasan Salameh, un palestinien bien connu, put échapper.
Pour éviter d'être fusillés, les parachutistes
capturés se donnaient pour « soldats de la Légion du
Mufti » et revendiquaient d'être traités en prisonniers
de guerre selon les lois internationales.
Les agents de la 5e Colonne et les parachutistes recevaient
très souvent l'aide des Arabes autochtones. Grâce à
quoi ils purent couper des lignes téléphoniques, saboter
des pipe-lines, des ponts et des lignes de chemin de fer en Palestine en
TransJordanie et en Irak. Hadj Amin se vantait que ses activités
obligeaient les Britanniques à maintenir dans le Moyen Orient des
forces importantes, pour éviter un soulèvement général.
Il précisait que seule la vigilance ininterrompue de milliers de
soldats alliés a pu contrecarrer une campagne de sabotage organisée
sur une grande échelle.
f I) Voir doc. N<J VI : un rapport officiel de l'Intelligence
britannique sur l'expédition de Tel Afar.
Pendant la guerre, chaque pont, chaque point d'importance militaire
devait ( soigneusement gardé. Le sabotage et l'espionnage organisés
par Hadj Amin constituent donc une collaboration directe avec l'espionnage
allemand.
ORGANISATION DES LEGIONS MUSULMANES.
L'une des grandes réalisations de Hadj Amin fut l'organisation
d'unités combattantes musulmanes. II ne cessait de réclamer
des fonds pour ces légions aux grands chefs allemands comme Ribbentrop
ou Himmler. Dans les Balkans, Hadj Amin recruta 15.000
Musulmans pour la Wehrmacht,
dont il fit la « légion noire » de Bosnie. Hadj Amin
inspecta personnellement certaines unités
et leur fit des discours. Il était en contact avec plusieurs
responsables balkaniques comme
Pavélic, son complice dans l'organisation
des unités musulmanes de la Wehrmacht.
Il établit avec le professeur Von
de Menele une école pour aumôniers musulmans (Imans) en Allemagne,
(photo ajout aval31)
Il prit contact aussi avec les chefs musulmans pro-allemands d'Afrique du
Nord, il soumit, au haut-commandement allemand
un plan du recrutement de 500.000
Marocains, Tunisiens et Algériens.
11 créa en Allemagne un bureau spécial pour l'Afrique du
Nord (]V:;iklab el JWagreb) financé par le Bureau du
grand Mufti à Berlin. Pendant
la campagne d'Afrique du Nord (qui ruina s t.* s projets
d'une armée musulmane nazie
nord-africaine) Haj Amin s'adressa à plusieurs
reprises par radio aux Musulmans d'Afrique du Nord, pour les
inciter à aider les armées de l'Axe et à s'opposer
aux Alliés.
En Russie d'Asie, Haj Amin eut
des milliers d'adeptes. Il collabora avec les Quislings musulmans
de Russie et les russes blancs, projetant de former des légions
nazies. Il fut en relation avec les Tatares de Crimée, les Tchétchènes
et Ingoushs,
les traîtres d'Azerbaïdjan, de Kurdistan et les leaders anti-soviétiques
des états incorporés à l'URSS. Après la guerre, deux
républiques musulmanes russes payèrent leur
30 traîtrise : elles furent abolies et leur population (400.000 Musulmans)
transplantée au-delà de l'Oural. Hadj Amin ne se borna pas
à militer pour la cause nazie en Europe, il accepta les propositions
du gouvernement japonais de s'adresser par radio aux Musulmans du Pacifique
sud et de l'Inde (1). Il prononça en effet de nombreuses allocutions
à l'adresse de l'Inde, de l'Indonésie et, de Java.
Formation des légions arabes et de la Brigade arabe.
Eu 1942, quelques mois après son arrivée
eu Allemagne, Hadj Amin commença à organiser des légions
arabes nazies. Elles comprenaient, des étudiants arabes, des prisonniers
de guerre arabes faits par les Allemands et des émigrés qui
avaient suivi l'ex-mufti en Allemagne. Les légionnaires portaient
l'uniforme allemand avec l'écusson « Arabie-libre » (2). pour
voir les photos, cliquez ici
En 1944, Churchill acceptait, la formation d'une Brigade
Juive qui comprendrait, les 26.000 juifs palestiniens luttant dans les
armées alliées. Hadj Amin obtint de Ribbentrop la formation
d'une Brigade arabe. Le 2 novembre 1944 il fit appel aux Arabes d'Allemagne,
de Palestine, d'Irak, d'Egypte et de Syrie- pour rejoindre cette
brigade.
Il ne faut pas oublier de mentionner la collaboration
de l'ex-Mufti avec les services allemands chargés de l'extermination
des Juifs, dont il porte une part de responsabilité. E. A. Mowrer
et d'autres auteurs ont publié des documents mettant ces faits t?n
évidence. Nous n'avons pas à en faire état ici, puisqu'ils
ne concernent pas directement l'effort de guerre arabe. (3)
(1) Voir documenLs photographiques planches VI et VII.
(2) Voir document 7 page ">2.
(3) ef «Le Haut Comité Arabe» aux Editions
de «La Terre- Retrouvée».
31
APRES LA GUERRE ON A MENAGE LES ARABES
Après El-Alamein la certitude de la victoire alliée
commençait à se faire jour. Alors, les chefs arabes et toute
la presse fasciste du Moyen-Orient changèrent de disque. Il ne fut
plus question que de sentiments démocratiques, de haine pour les
Nazis, et l'effort de guerre remarquable fourni par les Arabes en faveur
des Alliés. L'ex-Mufti lui-même se posa en champion de la
démocratie. Dans un article du New-York Times, (6 octobre 3946),
il revendiquait pour la Palestine le droit à « un gouvernement élu selon les règles de la
démocratie ».
Presque tous les nazis arabes arrêtés en
Syrie et au Liban par les Britanniques et les Forces Françaises
Libres avaient été libérés en 1943. La plupart
reprirent leur ancienne influence. Certains occupent aujourd'hui des postes
dirigeants dans les gouvernements de leurs pays.
En Egypte également, on libéra tous ceux
qui avaient été détenus comme agents nazis ou personnes
« dangereuses pour la sécurité publique ». Comme
dans les autres pays, ces collaborateurs « blanchis » tentèrent
d'atteindre des postes de commande. Plusieurs y ont déjà
réussi.
Les leaders arabes qui avaient été exilés
de Palestine sont rentrés eux-aussi. En premier lieu, on revit ceux
qui n'avaient pas été directement et trop ouvertement compromis
avec l'ennemi, comme le Dr. Hussein Khalidi, Auni Abd ul-Hadi, Musa Alami
(I). Ils devaient s'engager à ne pas faire de politique. Mais tous
reprirent très rapidement leur influence. Ils sont aujourd'hui reconnus
par les Alliés comme chefs des Arabes de Palestine. On vit revenir
aussi ceux qui avaient été déportés après
les troubles de 1936-39, y compris des gangsters
fl) Musa Alarai, représentant de la Palestine à
la Ligue
Arabe, dirige l'Office Arabe, qui a des succursales à
Jérusalem, Washington et Londres. I] trempa dans la révolte
d'Irak (voir document 3, page 48).
.32 notoires ayant un grand nombre de meurtres sur la conscience ; comme
: Shakir abd al-Aziz d'Idnibba, Abd ul-Hamid Jaulani d'Hébron, Mohammad
Taha Najjar de yibna, Fawzi Jarrar de Jenine. Plusieurs parmi eux étaient
restes cachés en Palestine. D'autres purent « s'arranger »
avec la police palestinienne à leur retour. D'autres encore ont
été autorisés à revenir en vertu d'une sorte
d'amnistie informulée et sans motif : le Dr. Mustafa Bushnaq, de
Naplouse (revenu d'Egypte), Darwish Maqdadi de Tulkam (revenu d'Irak) etc.
Et finalement, les ennemis déclarés de la Grande Bretagne,
qu'on avait déportés en Rhodésie parce qu'ils avaient
tenté de gagner l'Allemagne, ceux que Lord Cranborne, secrétaire
d'Etat aux Colonies, avait appelés à la Chambre des Lords
« des individus extrêmement dangereux », ceux-là
rentrèrent aussi. Il y avait parmi eux Jamal al-Husseini et sa suite.
Ils se remirent immédiatement à la tète de leurs partis
politiques et les Britanniques les reconnurent comme porte-paroles officiels
des Arabes de Palestine.
Seul Hadj Amin al Husseini ne put revenir. En 1945, le
Gouvernement yougoslave l'avait déclaré criminel de guerre.
A plusieurs reprises, Antony Eden, Noll Baker, Churchill et Oliver Stanley
l'avaient dénoncé comme un ennemi de la cause alliée.
A la fin de la guerre, l'ex-Mufti fut arrêté en Allemagne,
en zone française. Conduit à Paris, il vécut dans.une
somptueuse résidence jusqu'en juin 1946. Puis, il <t passa »
en Egypte (son voyage ne peut vraiment pas s'appeler une fuite). A l'heure
actuelle, les leaders arabes de Palestine et la Ligue arabe s'efforcent
d'obtenir son retour en Palestine et sa reconnaissance comme chef spirituel
et politique des Arabes de ces pays.
Les Alliés ont-ils mérité la haine des Arabes
?
Tant d'efforts tenaces à leur nuire peuvent nous amener à
poser cette question. Il faut répondre catégoriquement :
non. Alors que les Arabes ont à peine souffert des opérations
militaires, la guerre leur laissa d'immenses bénéfices.
Les Alliés ont dépensé
des sommes énormes dans les états arabes qui accumulaient
ainsi un balance-sterling, dont on
ne connaît pas le niveau exact, mais qu'on peut évaluer comme
suit : Egypte, 350 à 400 millions de livres sterling ; Iraq,
50 à 75 millions ; Syrie et Liban, 50 à 100 millions.
La réserve budgétaire de l'Egypte, qui fut de 28 millions
en 1938-39, s'élevait à Ci/ millions en
1941. Les Alliés fournissaient
aux paya arabes des approvisionnements et toutes sortes de
marchandises, à une époque
où tous les peuples d'Europe, 1rs Anglais y compris,
souffraient de sévères restrictions. Us achetaient
la production des Etats-arabes (le coton égyptien par
exemple) quand même ils n'en avaient nul besoin. lia fournissaient
du travail à des dizaines de milliers d'ouvriers arabes, et
leurs payaient des salaires extraordinairement
élevés. Ils contribuaient
au développement de ces pays, en construisant
des routes, des aérodromes, des chemins de fer, des maisons.
Tout cela enrichit scandaleusement un petit nombre de profiteurs
; mais l'ouvrier. le commerçant et dans une certaine mesure le fellah
lui-même en tirèrent bénéfice. En plus, les
Alliés payaient des subsides directs aux Etats arabes qui atteignirent
des sommes fantastiques en 1943 et 1944. En voici un exemple: la guerre
avait interrompu les pèlerinages musulmans en Arabie Séoudite
; la Grande Bretagne indemnisa le Gouvernement de ce pays. Et malgré
ces gestes. la sympathie des masses arabes allait
aux Nazis, Les Alliés n'ont reçu des Arabes que
l'aide qu'ils pouvaient en acheter ; ou qu'ils pouvaient les forcer
à fournir !
Ces faits sont pleins d'ironie. Toute l'histoire de l'effort
de guerre arabe » est pleine d'ironie, quand on songe quel a été
cet effort de guerre, qui en a profité, et quelles ont été
les récompenses. En dehors de l'Irak, les Etats arabes n'ont pas
lutté en fait pour l'Axe. Certes, toute leur sympathie allait au
fascisme. Mais ils étaient incapables de
mener une guerre
moderne. Ils n'avaient pas d'armes, ils n'avaient ni techniciens ni ouvriers
qualifiés pour édifier une industrie de guerre. Et, sans
industrie de guerre, la guerre moderne n'est, pas possible. Mais ils étaient toujours prêts à servir l'Axe, quand l'Axe
fournissait, l'argent, les avions et toutes sortes d'aide militaire. La
révolte d'Irak a prouvé
que les causes de la liberté et; de la démocratie n'intéressaient,
pas les Arabes, et que le monde arabe aurait accueilli avec faveur la chute
des démocraties occidentales et de la Russie. Voilà pourquoi
nous ne comprenons pas la politique d'apaisement pratiquée par la
Grande-Bretagne. On peut su demander si cette attitude est compatible avec
lus idéaux de paix et de liberté du monde de demain. DOCUMENT III
ht ROLE DE t'EX-MUFTI DANS LA REVOLTE D'IRAK
G. S. J. 1. 12. 41
General Service of Intelligence
L'ex Mufti arriva en Irak en octobre 1939, venant de Syrie.
On l'accueillit avec la pompe due à un héros national, et
toutes les personnalités de la capitale, du premier ministre au
moindre dignitaire, donnèrent des réceptions en son honneur.
Les clubs nationalistes lui firent le même accueil chaleureux. Ces
réceptions où figurait la fine fleur des réfugiés
politiques de Syrie et de Palestine et les réactionnaires irakiens,
prirent l'allure de démonstrations de nationalisme et de pan-arabisme
exacerbé.
On accusait naturellement les Britanniques d'être
les artisans du "martyr de la Palestine". On donnait libre cours
aux sentiments anti-britanniques. Le Mufti et sa clique y exprimaient non
seulement leurs haines, mais y calomniaient de la façon la plus
scandaleuse les Britanniques, les Juifs et leur politique palestinienne.
Les Irakiens caressaient le rêve d'un Empire arabe dont leur pays
serait le noyau. Ils accueillaient donc la propagande anti-britanniques
avec grande faveur. Le prestige de l'ex-Mufti augmentait à chaque
réception donnée en son honneur. Certes, Nuri Pacha avait
déclaré que Hadj Amin respecterait sa promesse de ne pas
se mêler de politique, et serait surveillé par le Gouvernement.
Mais en réalité, dès son arrivée dans le pays
il put intriguer sans entraves. Les égards dont on l'entourait l'y
encourageaient. Les ministres eux-mêmes lui faisaient tête !
L'ex-mufti établit son quartier général
et adapta ses méthodes de travail aux conditions politiques qui
prévalaient alors en Irak. Il distribua les rôles : Jamal
al Husayeini, chef d'Etat-Major. Shatk Hassan Abu Saud, conseiller
religieux, expert en Islam. Mausabey al Alama, conseiller juridique et
expert en questions occidentales (il fit des conférences sur les
« injustices britanniques ).
Fawzi al Qauqji contactait l'année irakienne et
obtenait ries armes, des munitions et la possibilité d'entraîner
des hommes en vue de la guérilla. Salim Abdur Rahan, officier de
presse. Le Comité des relations extérieures chargé
de la propagande, des intrigues et de toutes sortes d'activités
subversives en Irak et à l'étranger était composé
comme suit : Ishaq, Munif, Musa et. Towfiq Saleh alHusseini, Emil Ghouri,
Izzat Darv/aza. Ibrahim Darwish, Is-sudin ash Shawa. L'ex-Multi tenait
la caisse. II payait ses collaborateurs et bon nombre de réfugié?
qui n'avaient pas d'autre revenu que l'argent distribué par -es
soin.. L'ex-Mufti disposait d'un budget-considérable. On sait que
le Parlement irakien lui avait accordé 18.000 D. I. [*}. Le service
secret irakien lui allouait 1.000 D. I. par mois. Et Ton retenait à
la base de tous les traitements des fonctionnaires de l'Etat [y compris
l'armée et la police) 2% en sa faveur. De leur côté,
la Société de défense de la Palestine et le Croissant
Rouge recueillirent des sommes considérables par collectes, que
des dons généreux comme ceux du roi Ibn Séoud et ceux
de l'Egypte, venaient compléter. Enfin, on croît savoir que
les Allemands et les Italiens lui allouaient 60.000 D. I. et 40.000
D. I. respectivement.
Ces sommes permirent à l'ex-Mufti et à sa.
?é-qtielle ainsi qu'à certains politiciens syriens, de vivre
dans l'abondance. Plusieurs possédaient des voitures et se créèrent
des revenus confortables. Nul doute que certains devaient émarger
à d'autres caisses nazies.
Mais ce n'étaient pas les seulet ressources de
l'ex-Mufti en Irak. Il avait d'autres méthode? pour étendre
son influence sur le Gouvernement et en tirer de l'argent pour lui et ses
auxiliaire .
Il recommandait au Gouvernement des -Syriens
(*)1 Dinar Irakien = 1 livre sterling.
49
DOCUMENT V.
APPEL AUX ARABES D'AMERIQUE
Extrait d'une allocution
radiodiffusée par Haj-Amin AI-Husseini
à Rome, le 19 mars 1943.
Désormais, le règne de l'hypocrisie anglaise est terminé.
Les Arabes connaissent. les intentions de la Grande
Bretagne, et de son alliée, les Etas-Unis. Je veux attirer l'attention
des Arabes qui habitent l'Amérique
sur ces faits, on leur rappelant leur glorieux
passé national. Je veux aussi leur rappeller que nos efforts pour
libérer les peuples arabes seraient vains, si l'Amérique
et ses alliés (Dieu nous en préserve !) gagnaient cette guerre.
Alors, la libération des Arabes serait a jamais compromise, je suis
sûr que les émigrants arabes en Amérique se refuseront
d'aider Roosevelt et ne participeront jamais à une guerre
menée contre leurs frères.
Si les Alliés gagnent cette guerre, les Juif* seront
les arbitres du monde et les maîtres de ses richesses. On peut s'imaginer
quel serait l'avenir des musulmans, à quels dangers seraient exposés
leurs pays et leur foi, sous le règne des juifs et de leurs complices,
sous le règne de la haine.
Alors, Je monde serait Mu fer. Veuille Dieu nous en préserver
! Mais Allah est trop juste, trop miséricordieux, II ne donnera
pas la victoire à ces rapaces assoiffés de sang. Nous sommes
sûrs que nous aurons la victoire, nous et nos amis. Nous n'avons
pas \e moindre doute sur ce point. Nous ne faiblirons pas dans notre lutte.
Fi eu ne nous en détournera, rien ne nous fera taire. Ne vous laissez
pas intimider par les déclarations de nos ennemis. Vous connaissez
les dessous de leurs intrigues. Soyez convaincus que ceux-là seront
victorieux a la fin qui luttent, qui savent consentir des sacrifices, et
en attendre les fruits. DOCUMENT VI
Défense Securily Office C. I. C. I. Irak Bagdad
S. "405-1-1 9 décembre
VH4
L'EXPEDITION DES PARACHUTISTES
De T'EL-AFAR (*)
Rapport, N° 1
Les renseignements contenus dans ce rapport ont été
obtenus lors du premier interrogatoire de Khalil Rassol et de Humaid Fellah,
les deux parachutistes capturés à Tel-Afar le 28 novembre
1944 Certaines informations sur l'expédition nous étaient
parvenues dès avant l'arrivée des quatre parachutistes, ce
qui nous permit une plus parfaite reconstitution des i faits
(Cf. appendices A. B. (1. et D)
2. — Ces interrogatoires n'ont pas pu se dérouler
dans des conditions normales parce que deux services de sécurité
— britannique et irakien— enquêtèrent conjointement sur l'affaire.
Chaque service de sécurité a ses méthodes propres
(sans doute égale-mont efficaces lorsqu'il s'agit d'obtenir des
renseignements d'un oriental) mais chaque servie* cherche à recueillir
des informations de. nature différente. La plupart des interrogatoires
ont été menés conjointement par les deux services
do sécurité. Les Britanniques n'ont encore pu soumettre les
prisonniers à un interrogatoire sérieux pour leur seul compte.
3. — Dans l'estimation de la valeur des informations recueillies,
il ne faut pas perdre de vue que nous ne sommes pas absolument sûrs
que les parachutistes capturés aient dit la vérité.
De plus, nous avons acquis la certitude <rue le chef de l'expédition,
Kar-
[•) Nous ne reproduisons que les
parties essentielles d'un très long rapport de l'Intelligence
britannique.
|